François Bégaudeau
Quatrième de couverture:
"Ne rien dire, ne pas s'envoler dans le commentaire, rester à la confluence du savoir et de l'ignorance, au pied du mur. Montrer comment c'est, comment ça se passe, comment ça marche, comment ça ne marche pas. Diviser les discours par des faits, les idées par des gestes. Juste documenter la quotidienneté laborieuse. "
Entre les murs s'inspire de l'ordinaire tragi-comique d'un professeur de français. Dans ce roman écrit au plus près du réel, François Bégaudeau révèle et investit l'état brut d'une langue vivante, la nôtre, dont le collège est la plus fidèle chambre d'échos.
Ma lecture:
C'est un livre que j'avais depuis.... longtemps. Mais je laissais passer du temps pour m'y plonger, volontairement. Je craignais un peu ce que j'allais y lire probablement parce que mon agression, en septembre 2008 avait besoin de temps pour se soigner. Un jour, peut-être, j'écrirai là ma déposition faite à la gendarmerie, j'écrirai le procès... Un jour peut-être. Comme un témoignage. Mais je n'aime pas trop la place de victime que cela me ferait prendre. Bref... Je reviens au bouquin ou plutôt les questionnements que cela a fait germer chez moi.
L'usure: oui, les ados sont usants car, dans certains collèges, dans certaines classes, ils questionnent fortement notre place d'"autorité". L'usure également d'une institution qui ne sait pas trop faire avec les adolescents qui insultent, violentent, agressent et refusent l'effort des apprentissages.
Langage: les ados dont il est question dans le bouquin (et ceux dont j'ai eu la charge pendant de nombreuses années) manquent de mots, ne savent plus parler comme on l'attend dans l'enceinte scolaire. Le prof du bouquin d'ailleurs en joue: il a une façon de jouer sur les mots avec des élèves qui justement ont peu de mots (c'est discutable). La faute à qui, à quoi??? Tout de même, je me demande si les adultes ne montrent pas le mauvais exemple. Non pas les profs, mais ailleurs...
La contradiction entre ce que les études exigent d'un enfant, d'un ado et ce que la société nous montre. La télévision est terrible en cela. On donne à voir des émissions les plus abêtissantes (sous prétexte de non-prise de tête). Oui se détendre est important mais la bêtise est d'un autre ordre. Comme ces émissions qui jouent de l'humiliation, des embrouilles entre les participants, etc... Et qui fait les programmes??? N'est-ce point ces adultes qui après s'étonnent de voir le désintérêt des enfants pour la réflexion, l'écoute, la distance?
Un choix de société: il y a plusieurs choses qui, pour moi, doivent être "soignées" dans une société. La justice (et son budget, son fonctionnement) pour que le citoyen soit entendu dans sa plainte (et qu'il ne demeure pas victime), la santé (hôpitaux publics et accès aux soins sans tomber dans l'abus de ce bien public), etc... Et bien évidemment l'Éducation (pour tous) qui offre à chacun (malgré son origine sociale) la possibilité de sortir de sa classe sociale. Je n'ai rien, sachez le bien, contre le monde des petites mains (qui ont des petits salaires et qui font marcher la machine) mais il est bon de penser que les études peuvent mener à autre chose que la reproduction. Je crains qu'aujourd'hui l'ascenseur social soit en panne!!! Très très en panne et ça me révolte. L'éducation scolaire a besoin d'être dorlotée, qu'on en prenne soin car c'est prendre soin de l'enseignement offert à nos enfants!
Quant au livre en lui-même, il est intéressant de le lire pour justement saisir quelques images de ce que vivent nombre de mes collègues professeurs en collège. Voilà tout.
(Pour tout vous avouer, le film ne me tente pas. Des extraits suffisent. Et puis Bégaudeau... Bon voilà)
(Pour tout vous avouer, le film ne me tente pas. Des extraits suffisent. Et puis Bégaudeau... Bon voilà)
EXTRAITS:
P150: Conflit
J'ai pointé l'index sous son nez et collé mes yeux dans les siens.
- J'ai pas besoin d'tes commentaires.
- Pourquoi vous vous énervez?
- Tais-toi.
- Si j'veux j'rentre dans la classe.
- Essaie un peu pour voir.
Il remontait les marches à ma suite.
- Qu'est-ce que vous allez m'faire si j'rentre? Vous allez m'frapper?
- Bon ok, on va au bureau.
(...)
Bon an mal an, nous étions arrivés derrière la porte du bureau.
- Tu fais moins le malin, là.
- J'm'en fous.
- Tu t'en fous mais tu fais moins l'malin.
Le principal n'était pas là. Dico s'est réjoui en silence.
- Tu t'assieds là, je vais le chercher.
Il ne s'est pas assis.
- Tu t'assieds là et tu t'tais.
- C'est vous qui parlez."
P 262: Notation du brevet
" Content de son coup, le principal m'avait happé dans son bureau avec les airs de conspirateur.
- J'ai obtenu que les profs qui corrigeront le brevet ici ne corrigent que les élèves de ce collège.
- Ah?
Content de son coup.
- Comme ça, vous comprenez, ils comparent pas avec les copies d'un collège disons mieux loti, ils n'auront que des copies d'ici, ce qui permettra de hausser les résultats, vous voyez le truc?
- Jolie ruse.
(...)
- Non parce que sinon vous comprenez les bonnes copies d'ici, à côté des bonnes copies d'ailleurs, eh bien c'est tout con mais elles paraissent moyennes..."
Avez-vous lu ce livre?
En avez-vous vu l'adaptation cinématographique?
Comment ça se passe dans le collège de vos enfants?
Ma mere m'a envoye le film dans son colis "films francais pour Noel", et j'avoue qu'un nouveau Noel arrive sans que j'ai eu la motivation de le regarder... C'est un probleme si complexe, et qui a pourtant tellement besoin d'une solution... Mais c'est si frustrant que j'ai peur de ne pas vraiment apprecie mon temps de visionnage...
RépondreSupprimer*** Hello Chère Chrys ! :o) J'ai vu le film mais je n'ai pas lu le bouquin ... il va falloir que j'y songe ! :o) MERCI et bonne journée à toi ! :o) ***
RépondreSupprimerJe n' ai vu ni li film,ni lu le livre, mais j' ai tres envie de decouvrir
RépondreSupprimerj'ai lu le livre (j'ai beaucoup aimé) et aussi vu le film (je m'attendais à un désastre, et en fait il est très bien aussi). Par contre j'y suis allé avec des amis (italiens qui n'ont pas aimé du tout, ils ont trouvé qu'il n'y avait pas d'histoire, que ça manquait d'un personnage central, d'un héros et sans doute, d'après ce que j'ai pu comprendre, d'un happy end... alors que c'est justement ce qui m'a plu, cette sorte de compte-rendu sans solutions toutes faites... et aussi, cette insistance sur l'importance du langage, tellement juste...
RépondreSupprimerJ'ai vu le film et il m'avait bien plu. le livre me faisait un peu peur, honnêtement, parce que j'avais l'impression que le constat serait terrible. beaucoup plus qu'au cinéma.
RépondreSupprimermais là, à te lire, je me dis qu'il faudrait vraiment que je me lance...
J'aimerais beaucoup le lire et voir le film. Je ne savais pas pour ton agression, ce doit être un sacré traumatisme. Courage.
RépondreSupprimerJ'ai vu le film, avec ma fille d'ailleurs je crois, intéressant mais affolant...
RépondreSupprimerpoignant ton billet Chrys !!! ton agression est encore bien présente et normal d'avoir laisser du temps avant de lire ce livre. je ne sais pas si je le lirai ou verrai le film. Je vis parfois des agressions verbales chez les plus jeunes encore dans mes cours de théâtre, cela fait peur et l'angoisse ressentie me fait souvent penser qu'il y aura peut-être un parent un grand frère qui m'attendra à la sortie des cours pour m'agresser...c'est fou tout de même.
RépondreSupprimerni l'un, ni l'autre!mon fils rentre au collège l'année prochaine et j'ai un peu peur de ce qu'il va y trouver!sinon, tout à fait d'accord avec toi, on veut faire ressembler notre pays aux etats unis avec une santé pour les pauvres et une pour les riches, avec une ecole publique réservée aux délinquants pendant que les autres se payent une école privée.C'est moche, trés moche mais les gens n'ont pas l'air d'en prendre conscience alors.....
RépondreSupprimerJe n'ai jamais voulu voir le film. Peut-être lirai-je le livre pour être plus près des mots (ou maux). Il y a un film qui m'a énormément secouée c'est "La journée de la jupe" avec Adjani. L'as-tu vu ???
RépondreSupprimerTu parles du collège mais en élémentaire des situations comparables existent déjà. Quand tu vois la "détresse" avec laquelle les parents comptent sur l'école pour "éduquer" leurs enfants... tu te dis que l'avenir de ces enfants est d'avance très contrarié.
Bonne journée. BISOUS.
J'ai lu le bouquin et vu le film, adoré les deux !
RépondreSupprimerJ'ignorais pour ton agression :( Tout mon soutien, je sais que ça ne passe pas comme ça...
ma mère tristement au téléphone cette semaine me parlait de la pauvreté intellectuelle. oui c'est bien ça, l'abrutissement et la pauvreté intellectuelle, une chose à combattre de toute urgence. partout dans le monde.
RépondreSupprimerj'ai vu le film (un peu à reculons mais il passait en face de chez moi à NY et voir un film français c'est toujours plaisant). je me souviens déjà de mes années de collège très difficile. on était très difficile déjà. je plais vraiment les profs, il doit falloir avoir une sorte d'appel mystique de sauver le monde sans cesse renouveler pour aller enseigner tous les jours au collège.
(je plains les profs..)
RépondreSupprimerInvestir réellement dans l'enseignement est un choix de société, un choix politique ! La société bouge et l'école se fige, il est grand temps de réinvestir l'école ! TOUS les jeunes ont un potentiel terrible mais pour beaucoup l'école est un bulduzer qui les écrase et les envoie dans des filières liées plus à leur appartenance socio-écononomique qu'à leur aspirations réelles. Cela me révolte. Bon je m'arrête là... J'ai vu le film et lu le livre et j'ai aimé... Bises Chrys !
RépondreSupprimerChez nous les élèves ne sont ni sages ni gentils, ils crient trop (comme nous les espagnols, généralement) et bavardent pendant les cours...mais ils ne sont pas mauvais, du moins où je travaille, un petit lycée dans une petite ville. En plus, comme le français est une matière à option en secondaire je ne que les meilleurs élèves car les autres choisissent d'autres matières où il ne faut pas travailler...des ateliers....
RépondreSupprimerJ'ai vu le film Entre les murs mais je n'ai pas trop aimé, la banlieue de Paris n'est pas le reste de France (j'ai travaillé et vécu à Limoges, par exemple, et là-bas c'était très très bien)...je ne peux pas comparer non plus avec nos lycées chez nous...je crois que la diversité des gens dans les lycées français n'est pas comparable à celle de chez nous, peut-être à celle de Madrid ou la banlieue de Madrid mais c'est tout!
Je te fais de gros bisous et je te dis que malgré tout, j'adore mon métier et les collégiens et lycéens...
j'ai vu le film, bien déprimant..; des gamins en 3ème je crois qui ne connaissent pas l'imparfait, complètement incultes...
RépondreSupprimerUn livre qui effectivement doit être lu...Comme toi, nous avons connu l'agression en Collége l'an dernier (Ma soeur est CPE...) avec de la prison pour l'agresseur et un procés. C'est difficile d'oublier ces moments là et ce soir en te lisant, je repense aux moments que nous avons vécu et que nous pouvons subir tous les jours dans nos métiers. Bonne soirée...
RépondreSupprimerUn livre que je n'ai pas encore lu, mais qui me tente beaucoup.
RépondreSupprimerD'autre part, je découvre ton blog, que j'aime énormément, tu es déjà dans mes flux rss ! J'adore ta façon de prendre les photos des livres, j'aime ton écriture, la mise en page très sobre et mon mari qui est à coté adore les soleils dessinés par les enfants ! (il faut dire qu'il a monté un resto qui s'appelle "du soleil en cuisine", il se sent donc très concerné et comme il adore les couleurs...)
D'autre part, tu es lyonnaise, et j'y vais de temps à autre... j'avais d'ailleurs organisé une rencontre de blogueuses à Lyon cet été pendant mes vacances !
A bientôt donc !
Un bouquin à ajouter à ma liste :)
RépondreSupprimerBisous pour ta bonne soirée
Ni lu, ni vu..., pas envie en fait je crois ! Peur des clichés sûrement !
RépondreSupprimerPour tout dire, je ne l'ai pas lu, et je viens de voir le film. Un bon film, une histoire bien construite, celle d'un dérapage, mais ça semble loin de la réalité d'une ZEP (où je n'enseigne pas!), l'ambiance en huis-clos nuit pas mal.
RépondreSupprimerC'est en effet un sujet épineux... un livre que j'ai peur de lire... une crainte pour l'avenir de nos enfants, une peur face à la société qui se construit et que nous, éducateurs, ne pouvons plus sauver... là je suis vraiment pessimiste... j'ai peur pour mes enfants qui vont grandir dans cette société... j'ai peur pour mon boulot, peur de perdre la philosophie qui me guidait à aider chaque enfant dans son parcours....
RépondreSupprimerBon là, j'arrête ou je vais me jeter à nouveau sur mon chocolat... mais ton article fait réfléchir...
J'ai vu ce film et j'ai trouvé cela terrible,
RépondreSupprimertant de destin à peu près, de jeunes qui passent à côté en se croyant durs et caïds et des enseignants démunis..
Ni lu ni vu le film (que j'ai pourtant!). Mais ton article est très intéressant... J'avais en effet cru comprendre qu'avant les petits tu travaillais avec les ados mais je ne savais pas pour l'histoire... pas facile d'oublier en effet...
RépondreSupprimerJe ne garde pas un souvenir impérissable de cette lecture, le style m'avait un saoulée à force.
RépondreSupprimerMais, bon un sujet d'actualité, une histoire qui l'est tout autant.
Boulie